Coronavirus et télétravail : l’occasion de faire le point sur une pratique en devenir ?
Le contexte actuel de crise sanitaire mondiale nous incite à modifier, au moins temporairement, notre manière de travailler et notre rapport à cette dernière. Les gouvernements prônent des pratiques de travail « à distance » afin de limiter la propagation de la pandémie de Coronavirus : voilà donc le télétravail qui fait son retour. À ce titre, le journal Les échos parle même de « révolution » des usages. De son côté, Radio Canada se demande si le Canada « pourrait fonctionner en mode télétravail ». Pourtant, une telle pratique n’est pas nouvelle.
L’histoire du télétravail
La pratique du télétravail date du milieu des années 1990. Après une belle envolée, son utilisation est demeurée largement minoritaire. À cet égard, elle semble être encore assez marginale. En effet, le Québec compte actuellement de 5 à 8 % de télétravailleurs, ce qui en ferait tout de même l’un des taux les plus élevés dans le monde d’après Jocelyne Parisella. Par ailleurs, selon Statistique Canada, en 2008, ce sont surtout et principalement les travailleurs autonomes qui en font le plus largement usage (60 %).
Aujourd’hui, l’actualité semble vouloir accélérer cette pratique. En France par exemple, le gouvernement annonce vouloir inciter au télétravail pour tous, comme le souligne Philippe Escande dans le journal Le monde : « En théorie, le télétravail apporte flexibilité et liberté au salarié, il est plus écologique, en abolissant les déplacements, et colle au désir d’autonomie de générations converties aux réseaux sociaux de masse. On peut donc imaginer une vraie rupture dans la transformation du travail ».
Les impacts du télétravail
Le développement du télétravail induit un changement de représentation du travail. Ainsi que le souligne la sociologue Alexandra Bidet (2016), la conception du travail a évolué : « Avant, travailler c’était être présent de telle heure à telle heure sur des lieux dédiés. À l’opposé, il y a l’idée que peu importe le temps de présence, seul compte le résultat. Ça peut être une chance pour ceux qui préfèrent travailler de chez eux. Mais la question de l’expérience vécue du travail demeure la même : comment les employés vont-ils considérer qu’ils produisent effectivement quelque chose ? »
Ainsi, certains « effets pervers » semblent s’associer à une telle pratique.
En plus d’une perte de repères et de sens, on pourrait penser à une forme d’isolement induisant une distanciation des relations, avec le risque d’une désocialisation des rapports humains, mais aussi le risque d’une confusion accrue des limites entre le travail et la vie privée.
Au-delà des avantages et des inconvénients qui existent à recourir au télétravail et selon la revue systématique sur les effets du télétravail chez les gestionnaires, il existe un niveau de preuve modéré permettant d’affirmer que le télétravail améliore la satisfaction au travail. De plus, des niveaux de preuve faibles permettent d’affirmer que le télétravail améliore la performance au travail et le sentiment d’autonomie.
L’avenir du télétravail
Dans le contexte actuel de crainte et d’inquiétude face au Coronavirus, la question qui demeure n’est-elle finalement pas de savoir si nous souhaiterons retourner sagement au bureau quand l’orage pandémique sera derrière nous ?
Références
https://www.lesechos.fr/idees-debats/editos-analyses/les-bienfaits-dune-epidemie-1185850
https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1662843/coronavirus-teletravail-gouvernement-canadien
http://www.portailrh.org/effectif/fiche.aspx?p=559349